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alicethevenard

DANS LE MILLE !

Dernière mise à jour : 7 oct. 2019



C’est une histoire bête…


2 ouvriers travaillent sur un chantier de rénovation de la toiture de la résidence secondaire d’un particulier.


Au retour de la pause déjeuner ils s'amusent à chahuter, le premier a envoyé de l'eau sur son collègue qui a alors l’idée d'aller chercher un arc et une flèche dans la grange où les ouvriers entreposent leur matériel.


Ces objets appartiennent au client, sont complètement étrangers à la rénovation de la toiture en cours, et sont utilisés sans aucune autorisation.


Guillaume Tell tire, touche et blesse son collègue à la tête.


Accident du travail ?


« L’accident du travail est celui qui survient, quelle qu’en soit la cause, par le fait ou à l’occasion du travail, à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs » (article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale).


Donc, pour être considéré comme un accident du travail l'événement accidentel doit s'inscrire dans le cadre de l'exécution du contrat de travail, alors que le salarié se trouve sous le contrôle et l'autorité de son employeur.


Le texte prévoit qu’il s’agit d'une présomption, ainsi la qualification d'accident du travail peut être écartée si le fait accidentel est la conséquence de faits non professionnels.


Néanmoins c’est à celui qui conteste cette présomption, de prouver que le salarié s’est soustrait à l’autorité de l’employeur ou que l’accident a eu une cause « entièrement » étrangère au travail.


Accident du travail ???!!!?


Dans notre affaire, l’ouvrier « maladroit » est poursuivi au pénal pour blessures involontaires, mais l’employeur et son assureur sont, eux aussi, mis en cause. Mise en cause qu'ils contestent : selon eux, il ne s’agit pas d’un accident « du travail ».


En effet, l’accident a certes eu lieu sur le lieu de travail, mais les salariés n’avaient pas encore repris le travail. Ils n’étaient donc pas placés, à ce moment précis, sous l’autorité de l’employeur.


En outre les circonstances de l’accident sont complètement étrangères au travail qu’ils réalisaient.


Suffisamment d’arguments, selon eux, pour que seule la responsabilité de l'archer soit engagée.


Accident du travail !


Malgré ces circonstances particulières, la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation estime que l’employeur et son assureur ne sont pas parvenus à renverser la présomption selon laquelle l’accident intervenu sur le lieu et dans le temps de travail est un accident du travail, car ils n’ont pas démontré que les salariés s’étaient soustraits à l’autorité de l’employeur et que l’accident avait une cause entièrement étrangère au travail.


La Cour de Cassation précise, en outre, que du point de vue de la législation des accidents professionnels, la pause déjeuner relève du temps de travail.


Ainsi, dès lors que la pause déjeuner est considérée comme du temps de travail, l’accident survenu à ce moment-là doit être présumé imputable au travail car il suffit que le salarié demeure sous l’autorité de l'employeur pour que l’accident soit reconnu comme accident du travail.


On le voit la Cour de Cassation a une appréciation large de la définition d’accident du travail...


Parions que renverser une telle présomption ne sera pas un exercice des plus faciles pour l’employeur, qui devra désormais « cibler » au plus juste son argumentation.


Conséquences de l’accident du travail


La survenance d'un accident du travail (AT) ou d'une maladie professionnelle (MP) génère des coûts pour l'entreprise.


Pour les entreprises de moins de 10 salariés, le taux de cotisations AT/MP dépend du secteur d’activité, pour les autres, ce dernier est fonction du risque à partir du coût des accidents du travail et des maladies professionnelles dont les salariés ont été victimes.


Ces cotisations participent au remboursement des frais avancés par la Sécurité sociale auprès du salarié (indemnités journalières, frais médicaux et hospitaliers, rentes, etc.).


Un accident peut entraîner une majoration de la cotisation, tout comme un manquement à la réglementation ou le refus de prendre des mesures préventives.


Les entreprises jugées exemplaires bénéficient en revanche d’un allègement.


Tout accident du travail donne aussi lieu à une analyse de ses causes par l’inspection du travail et la Caisse d’Assurance Retraite et de la Santé au Travail (Carsat). En ressortent, selon le degré d’implication de l’entreprise, des mesures incitatives ou coercitives, visant à renforcer la sécurité des salariés.


La qualification d'accident du travail n'est donc vraiment pas anodine, et les entreprises se doivent d'être particulièrement vigilantes.


Pour autant, et même si les conséquences pour la victime peuvent être dramatiques, on ne peut qu'être effaré par le niveau de bêtise de certains...


Cass. crim. 5 mars 2019, n° 17-86984 D .



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